Rédaction de certificats de travail: difficultés juridiques

Découvrez régulièrement sur notre blog des articles écrits par des spécialistes et experts du monde des Ressources Humaines. Nous avons à coeur de donner à ces auteurs une totale liberté totale tant sur le choix des sujets que sur l’angle d’analyse. Découvrez ci-dessous l’article rédigé par Roland Bachmann, docteur en droit et avocat spécialisé en droit commercial et en droit du travail. 

 

En Suisse, le certificat de travail est un instrument important pour le recrutement de collaborateurs. Un candidat présentant un mauvais certificat de travail dans son dossier n’est souvent pas convié à un entretien d’embauche. Ce n’est donc pas surprenant que les employés passent à la loupe les certificats rédigés par leurs employeurs. Cet article traite des différents aspects à observer lors de la rédaction de certificats de travail.

Quels éléments doivent figurer sur un certificat de travail pour qu’il soit complet et correct ? Quelles sont les exigences fixées par le droit du travail concernant les certificats en Suisse ? Nous allons voir tout cela et plus encore.

1. Certificat de travail intermédiaire ou certificat de travail final

Si l’employé demande un certificat au cours d’une relation de travail, il faut lui donner un certificat intermédiaire. A l’inverse, à la fin d’un rapport de travail, c’est un certificat final qu’il faut rédiger. Au niveau du contenu, c’est avant tout le choix des temps verbaux qui diffère.

On utilise généralement le présent pour un certificat intermédiaire et le passé pour un certificat final. Pour les certificats intermédiaires, on indiquera plutôt la raison de ce certificat à la place de la durée de la relation de travail. Par exemple, il sera précisé que l’employé a demandé lui-même ce certificat ou qu’il intervient après un changement de supérieur ou une restructuration de l’entreprise.

2. Un certificat de travail peut être demandé à tout moment

Un employé peut demander un certificat de travail à tout moment et l’employeur doit répondre à cette demande. Il peut toutefois refuser cette requête si le travailleur demande chaque mois un nouveau certificat. Tout simplement parce que ce n’est pas nécessaire. S’il insiste constamment, ce sera même considéré comme une demande abusive. La recommandation générale serait d’accepter que la demande d’un certificat de travail une fois par année. Certaines circonstances exceptionnelles, comme la recherche d’un nouvel emploi ou le changement de supérieur, doivent toutefois être prises en compte. Il peut donc arriver que le délai entre deux certificats soit plus court dans des cas particuliers.

En principe, l’employé peut demander un certificat de travail même après la fin d’une relation de travail. La plupart des juristes s’accordent sur le fait qu’un collaborateur peut encore demander un certificat jusqu’à dix ans après la fin de la relation de travail. En d’autres termes, l’employeur est contraint de conserver toutes les données nécessaires à la rédaction d’un certificat de travail pendant dix ans.

Si l’employé souhaite que son dossier personnel soit détruit à la fin de son contrat pour des raisons de protection des données, il perd son droit d’exiger un certificat. Et ce, peu importe s’il en a déjà reçu un ou non. En exigeant la destruction de son dossier personnel, il indique à son ex-employeur qu’il ne désire plus recevoir de certificat de travail. C’est pourquoi, dans ce cas-là, le collaborateur n’a plus le droit de réclamer un certificat, même s’il n’en a pas encore reçu.

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3. Documents importants pour le certificat de travail

Les données et informations nécessaires à la rédaction d’un certificat de travail se trouvent dans des documents divers et variés : dossier de candidature de l’employé, contrat de travail existant et description du poste, comptes-rendus des entretiens, évaluations du collaborateur, objectifs en matière de salaire, notes diverses, blâmes ou avertissements éventuels, feedback de la part des clients, certificats intermédiaires déjà existants, lettre démission ou de licenciement, ainsi que les décisions de justice, les certificats médicaux, etc.

4. Protection des données et de la personnalité pour le certificat de travail en Suisse

L’employeur est légalement contraint de protéger et de respecter la personnalité des collaborateurs (art. 328 CO). Le droit à un certificat de travail est également compris dans ce devoir car il permet de faciliter la suite du parcours professionnel de l’employé à la fin de la relation de travail. Pour atteindre cet objectif, il faut veiller à certains aspects de la protection des données et de la personnalité. C’est pourquoi le certificat de travail doit contenir des informations bienveillantes, vraies et complètes.

a) Informations justes et bienveillantes

Le certificat de travail couvre l’ensemble de la relation de travail. C’est l’impression générale donnée par le collaborateur durant toute la durée du contrat qui est déterminante. Afin de ne pas compliquer la suite du parcours professionnel de l’employé plus que de raison et de protéger sa personnalité, l’employeur se doit d’utiliser des formulations bienveillantes. Les incidents ponctuels qui ne sont pas caractéristiques du travail et de la personnalité du collaborateur devraient donc être laissés de côté. Le certificat ne doit pas non plus contenir d’allusions voilées offensantes. Par ailleurs, utiliser un langage codé, qui transmettrait une image différente de l’employé aux initiés et aux lecteurs lambda, est tout à fait inadmissible.

La personne qui traite des données personnelles doit s’assurer qu’elles sont correctes (art. 5 LPD). Les informations dans le certificat de travail doivent donc être correctes, c’est-à-dire objectivement justes. Par conséquent, l’employé ne peut pas demander que certaines tâches figurent sur son certificat de travail s’il ne les a jamais effectuées au cours de la relation de travail. Ce sont les activités effectivement effectuées qui comptent, non la description formelle du poste.

En pratique, on peut parfois avoir des doutes sur la façon d’utiliser une formulation bienveillante sans donner une impression ambiguë ou fausse. Dans ce cas, c’est le devoir de vérité qui prime. Le devoir d’utiliser une formulation bienveillante se heurte aux limites de la vérité objective. L’employeur ne doit pas accepter d’écrire des contrevérités dans un certificat de travail. En effet, les futurs employeurs doivent pouvoir compter sur le fait que les informations contenues dans le certificat dressent le portrait réel de l’employé.

b) Exhaustivité

Le certificat de travail doit être exhaustif. L’employé peut choisir s’il veut une simple attestation de travail (certificat simple) ou un certificat complet (certificat de travail en bonne et due forme).

(1) Attestation de travail

Une attestation de travail ne contient que des informations sur la nature et la durée des rapports de travail (art. 330a al. 2 CO). C’est la durée de la relation de travail indiquée dans le contrat qui fait foi, non la durée effective du travail jusqu’à la mise en disponibilité.

Une attestation de travail ne comprend pas d’évaluation des performances et du comportement du travailleur dans l’entreprise. C’est pourquoi ce type de document soulève régulièrement des questions durant le processus de recrutement. Toutefois, il peut être utile pour un employé s’il a commis un délit ou une faute professionnelle grave qui devraient être indiquées dans un certificat complet.

(2) Certificat complet

Si l’employé ne demande pas expressément une attestation de travail, il faut rédiger un certificat complet (art. 330a al. 1 CO). Le certificat de travail complet doit contenir toutes les informations essentielles à l’évaluation globale du collaborateur, mais elles doivent se limiter à l’aptitude du travailleur à occuper un poste précis (art. 328b CO ; art. 4 LPD).

Le certificat de travail comprend des informations sur la nature et la durée des rapports de travail, sur les compétences et les connaissances linguistiques de l’employé, les formations continues qu’il a suivies, ainsi qu’une évaluation quantitative et qualitative de ses performances. Il peut aussi contenir des données sur son comportement envers les clients, ses supérieurs ou les autres collaborateurs.

Les aspects négatifs doivent être mentionnés s’ils sont essentiels pour l’évaluation globale et qu’aucune formulation positive correspondant à la vérité n’a pu être trouvée. Une information négative sur les performances de l’employé ou une critique sur son comportement ne peuvent être mentionnées dans le certificat que si les faits peuvent être prouvés.

Il en va de même pour les maladies. Si la maladie a eu une influence considérable sur les performances ou le comportement de l’employé au travail, il faut la mentionner dans le certificat (même si ce collaborateur n’est pas d’accord). En outre, si la maladie est à l’origine de la dissolution du contrat de travail car elle remet en question l’aptitude du travailler à occuper son poste, il faut la citer comme motif de départ.

L’employé n’est pas en droit d’exiger une évaluation ou une formulation précise. Il ne peut pas exiger de mots de remerciement ou de bons vœux pour la suite car ce ne sont, à strictement parler, pas des éléments indispensables dans un certificat de travail. Toutefois, remercier le travailleur et lui souhaiter ses meilleurs vœux pour son avenir est une pratique courante et les collaborateurs ont tendance à les attendre.

Pour qu’il soit pertinent, un certificat de travail doit indiquer clairement à quelle période il fait référence. Une évaluation des performances professionnelles sur une période de quelques semaines seulement aura bien moins de valeur qu’une évaluation sur plusieurs années. C’est pourquoi il est important de mentionner les interruptions de travail ou les congés prolongés durant les rapports de travail s’ils sont significatifs par rapport à la durée totale d’emploi.

Si l’employé demande un certificat de travail complet, il peut aussi exiger par la suite une attestation de travail et vice versa. Cependant, il ne peut pas demander à ce que son certificat ne mentionne que ses bonnes prestations et que ses manquements sur le lieu de travail soient passés sous silence. Il peut seulement choisir entre une simple attestation et un certificat de travail complet, qui contiendra toutes les informations, qu’elles soient positives ou négatives.

Si un certificat de travail ne contient aucune information sur le comportement de l’employé, il faut comprendre que mentionner ces informations auraient été plus préjudiciables que les taire complètement. Il va donc de soi que dans ces cas-là le collaborateur devrait en parler à son employeur. Si certaines informations ont été omises par erreur, l’employeur doit rédiger un nouveau certificat, en complétant les données manquantes avec des éléments justes néanmoins bienveillants. On peut faire appel au département RH pour ce numéro d’équilibrisme.

5. Langue du certificat de travail

Le certificat doit être rédigé dans la langue parlée sur le lieu de travail. Par conséquent, dans les entreprises romandes, les certificats doivent normalement être rédigés en français, même si le travailleur vient de Zurich et qu’il parle allemand.

Dans les multinationales, la langue de travail est souvent différente de la langue locale. Certaines entreprises vont même jusqu’à instaurer l’anglais comme langue officielle à partir d’un certain niveau hiérarchique. Dans un tel cas, l’employé peut demander un certificat de travail rédigé dans la langue de travail (généralement l’anglais). Il peut également demander un deuxième exemplaire, dans la langue locale cette fois-ci (en français, dans notre cas).

6. Informations sur la fin des rapports de travail

Sur demande de l’employé, la nature et le motif de la dissolution des rapports de travail (développement professionnelle, licenciement pour raisons économiques) peuvent être précisés dans le certificat de travail. La raison du départ peut être ajoutée au certificat contre la volonté du travailleur uniquement si son omission donnerait une fausse impression du collaborateur.

7. Date et signature du certificat de travail

La date figurant sur le certificat doit être celle du jour où il est remis au collaborateur. La date peut être ultérieure au dernier jour de travail.

Le certificat doit être signé par un supérieur hiérarchique de l’employé et par une personne du département RH ou un second supérieur. Si le certificat de travail était signé par un collaborateur subordonné ou toute personne à un niveau hiérarchique inférieur, cela pourrait porter atteinte aux droits de la personnalité du travailleur.

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Roland Bachmann

Docteur en droit et avocat spécialisé en droit commercial et en droit du travail, Roland Bachmann s’intéresse plus particulièrement aux processus intervenant dans le droit des assurances et celui du travail. A travers son activité d’expert en droit, Roland Bachmann assiste de près à l’évitement ou à la résolution de conflits juridiques. Au cours de ses articles, il abordera les questions sensibles liées au droit du travail.

 

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